Près de 30 ans après sa sortie, l’originalité du film fiction Taafé Fanga lui assure une intemporalité sans pareil à l’image de la question de l’égalité des sexes qu’il aborde.
Taafé Fanga ou le pourvoir du pagne en langue bamanan/ dioula est un film fiction qui dépeint le la place de la femme dans la société malienne. Le thème met aussi en exergue la richesse de la tradition orale en Afrique.
Le patriarcat
Pendant 98 minutes, cette œuvre comique scénarisée et réalisée par Adama Drabo fait le tour des inégalités sociales qui régissent l’organisation de la vie traditionnelle en Afrique subaharienne. De la répartition genrée des tâches au mariage d’enfant en passant par l’exclusion des femmes aux instances décisionnelles, l’actrice principale Maïmouna Hélène Diarra et ses pairs présentent un tableau peu reluisant du poids des us et coutumes qui pèsent sur la femme. L’autre moitié du ciel ploie sous une misère banalisée par les principes du patriarcat. On pourrait même dire qu’elle est normalisée et savamment entretenue pour lui assurer un règne sans fin. Les injustices représentées sont si flagrantes que même la petite Koumi, dans la candeur de son innocence, les redoute déjà. Dans une confession faite à sa grand-mère, elle lâche : « Je ne souhaite pas devenir comme toi ! ». Ce « toi » vu comme une figure avilissante de la femme marginalisée, maltraitée, malheureuse et dépourvue de tout droits.
Lutte couronnée
Contre toute attente, l’espoir renaitra à partir d’une révolte spontanée. Et le plus grand des hasards établit la gent féminine au firmament de ses potentialités. Malheureusement, les abusées d’hier ne retiennent aucune leçon du passé. « Le Pourvoir du pagne » ne fera pas mieux que son prédécesseur. Surfant sur les acquis qu’il n’essaie guère de consolider. Taafé Fanga s’illustre à son tour par une gestion exclusive des ressources. L’on bascule véritablement d’un extrême à un autre. Et les mêmes causes finissent par produire les mêmes effets. La puissance du masque sacré Andanboulou est mise à rude épreuve et se vide de son sens.
Légalité à l’horizon
Puis un vent de liberté souffle à nouveau sur le royaume Dogon. Pas en changeant de direction cette fois-ci, mais pour annoncer plutôt les perspectives d’un monde plus juste et équitable pour les deux sexes. N’est-ce pas ce message que traduit la naissance de jumeaux mixtes qui sonne le clap de fin de Taafé Fanga?
Aminata SANOU